"J’ai la rate qui s’dilate !"
Où l’on découvre un organe qui ne manque pas d’air.
Où l’on découvre un organe qui ne manque pas d’air.
2015, archipel indonésien. Melissa Ilardo, chercheuse en génétique, accompagne les pêcheurs de la communauté Bajau en excursion. Soudain, l’un d’entre eux repère une proie et plonge en apnée, sans matériel ni difficulté, à 20 mètres de profondeur !
Un plongeur Bajau avec son masque en bois, 2015, photographie, photo : Melissa Ilardo
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Cette performance à couper le souffle n’est pourtant que routine pour ce peuple de chasseurs-cueilleurs marins qui passent environ 60 % de leur temps de travail sous l’eau.
Ces "nomades de la mer" pratiquent la pêche en apnée depuis un millénaire et sont capables de rester sous l’eau plus de 10 minutes et de descendre jusqu’à 70 mètres de profondeur ! Pas mal, surtout que le record mondial d’apnée statique est de… 11 minutes 35 secondes.
Un nageur Bajau chassant sous l’eau avec un harpon, 2015, photographie, photo : Université de Cambridge, Melissa Ilardo
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Pour comprendre ces capacités exceptionnelles, il faut d’abord se plonger du côté du "réflexe d’immersion", un automatisme propre aux mammifères qui se déclenche lorsque notre visage est immergé dans l’eau froide.
Il nous permet de prolonger notre temps en apnée en provoquant un ralentissement de notre rythme cardiaque, une redistribution de l’oxygène disponible en priorité aux organes vitaux et enfin une contraction de la rate.
Regarder le reportage de Deeper Blue sur le réflexe d'immersion des mammifères, 2021 (vidéo en anglais sous-titrée en anglais)
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En effet, la rate, surtout connue pour son rôle dans notre système immunitaire, fait également office de réserve de cellules sanguines. En se contractant, elle libère des globules rouges oxygénés dans le sang qui vont légèrement prolonger notre survie sous-marine.
Libération des globules rouges oxygénés dans le sang, illustration Artips Sciences, Magalie Jourdain
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Et c’est justement ce point qui intéresse Melissa Ilardo. Munie d’un échographe portatif, elle a pu mesurer la taille de la rate de certains Bajaus, et la comparer avec celle de leurs voisins géographiques et génétiques, les Saluans, au mode de vie plus traditionnel.
Les femmes Bajaus vendent leurs poissons au peuple sédentaire Saluan, photo : capture d'écran
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Le résultat est sans équivoque : la rate des Bajaus est jusqu’à 50 % plus grande, ce qui est bien pratique pour avoir plus de globules rouges disponibles en cas de manque d’oxygène ! Espérons que grâce à cette adaptation génétique, les pêcheurs Bajaus ne "ratent" pas le poisson...
Différence de la taille des rates des peuples Bajau et Saluan, illustration Artips Sciences, Magalie Jourdain
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