"Fan à la vie à la mort"
Où l’on rencontre un artiste un peu groupie.
Où l’on rencontre un artiste un peu groupie.
1829, Londres. Le peintre William Turner lâche ses pinceaux et prend son courage à deux mains. Même s'il n'a qu'une cinquantaine d'années, il souhaite écrire son testament. Et l'artiste a des idées assez excentriques pour affronter la grande faucheuse !
Turner est alors un personnage solitaire, qui vit reclus avec ses chats. Il n'aime que deux choses : ses peintures et celles de Claude Lorrain.
William Turner, Autoportrait, vers 1799, huile sur toile, 74 x 58 cm, Tate Britain, Londres
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Ce dernier, un peintre français mort depuis plus d'un siècle, a eu très tôt une grande influence sur Turner. L'artiste aurait même versé une larme lors de sa première rencontre avec l'une de ses œuvres.
Claude Gellée, dit le Lorrain ou Claude Lorrain, Port de mer au soleil couchant, 1639, huile sur toile, 100 x 130 cm, Musée du Louvre, Paris
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Et il n'est pas le seul : Claude Lorrain jouit d'une popularité inouïe en Angleterre. Les Britanniques l'appellent même uniquement par son prénom, Claude. Un peintre ne peut espérer une plus belle reconnaissance !
William partage avec Claude le même goût pour la lumière, qui baigne leurs paysages grandioses d'une atmosphère dorée.
Claude Gellée, dit le Lorrain ou Claude Lorrain, Ulysse remet Chryséis à son père, vers 1644, huile sur toile, 119 x 150 cm, Musée du Louvre, Paris
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Son tableau Didon construisant Carthage est d'ailleurs un hommage aux toiles du Lorrain. Quinze ans après l'avoir peint, Turner le considère toujours comme son plus grand chef-d'œuvre. Au point de ne jamais vouloir le quitter…
En effet, on retrouve dans son testament un souhait un peu fou : l'artiste désire être enterré enroulé dans cette toile ! Il passerait ainsi l'éternité en sa compagnie.
Joseph Mallord William Turner, Didon construisant Carthage, 1815, huile sur toile, 155 x 232 cm, National Gallery, Londres
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Finalement, Turner renonce à son idée loufoque. Il réserve néanmoins un destin exceptionnel à sa chère peinture : il exige qu'elle soit exposée à la National Gallery, entre deux tableaux de Claude Lorrain.
Cette fois, Turner est satisfait de sa décision, qui sera dûment respectée ! Et l'artiste peut mourir tranquille, sachant son œuvre accrochée pour l'éternité près de celles de son idole.
En haut : Didon construisant Carthage de Turner (à gauche) à côté du tableau L'Embarquement de la reine de Saba, de Claude Lorrain (à droite) / En bas : Claude Lorrain, L'Embarquement de la reine de Saba, 1648, huile sur toile, 149 x 193 cm, National Gallery, Londres
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