"Banc à part"
Où l’on fait la foire avec sérieux.
Où l’on fait la foire avec sérieux.
Nous sommes à Troyes, au 12e siècle. La foire bat son plein. Pourtant, un homme se tient à l'écart… Assis sur un banc, loin du tumulte, il échange minutieusement des pièces de monnaie que lui tendent des commerçants. Que peut-il bien fabriquer ?
À l'époque, les foires de Champagne sont les carrefours commerciaux de l’Europe : épices, draps, denrées alimentaires… on y trouve de tout !
Scène de foire, vers 1400-1405, enluminure extraite de Le Chevalier errant de Thomas III de Saluces, 2,6 x 3,4 cm, Bibliothèque nationale de France, Paris
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Pourquoi ? Pour deux raisons. D'une part, la Champagne est idéalement située entre deux régions championnes du commerce à l’époque : la Flandre et l’Italie. C'est donc un endroit parfait pour que les commerçants des quatre coins de l’Europe se retrouvent.
D'autre part, le roi de France et les comtes de Champagne assurent la protection des marchands, garantissant ainsi la confiance nécessaire à la bonne marche des affaires.
Illustration Artips
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Mais il reste un problème : tous ces commerçants arrivent avec la monnaie de leur pays ou de leur région. Cela complique beaucoup les transactions… Il faut donc des personnes capables de convertir une monnaie dans une autre : des changeurs.
Marinus van Reymerswaele, Le changeur et sa femme, 1539, huile sur panneau, 83 x 97 cm, Musée du Prado, Madrid
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D'abord installés sur des bancs, ces spécialistes de la monnaie s'équipent peu à peu d'étals, que l’on appelle également "bancs". Et c’est ainsi qu’en Italie, on finit par désigner ces gens comme des banchiere, terme qui donne banquier en français.
Coacharelli, Banquiers autour d’un comptoir italien (banca), 1340, enluminure, British Library, Londres
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Car ces changeurs diversifient bientôt leurs activités et se rapprochent de nos banquiers modernes : ils se mettent à conserver l'argent de leurs clients et accordent des prêts. Tout comme une banque !
Rembrandt Harmenszoon van Rijn, La parabole du riche fou, 1627, huile sur bois, 31,9 x 42,5 cm, Gemäldegalerie, Berlin
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Mais une banque, ça peut faire faillite… Un événement qui n’était pas mieux vécu à l’époque que de nos jours. Si bien que lorsque les changeurs, à sec, ne peuvent plus rembourser tous les clients, on casse de façon hautement symbolique leur banc. "Banca rotta" en italien (banc cassé), devenu chez nous la "banqueroute" !
Goldin + Senneby, Banca Rotta, 2012-2018, table de changeur sciée en deux, 123 x 123 x 76 cm ADAGP, Paris, 2021, photo : Gianmarco Bresadola
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